Utilisation de caméras corporelles par les policiers et inquiétudes en matière de vie privée

Auteure: Catherine Paquin-Veillette, Étudiante au cours de DRT6929E

Le 18 février dernier, le Commissariat à la protection de la vie privée du Canada a rendu public un Document d’orientation pour l’utilisation de caméras corporelles par les organismes chargés de voir au respect de la loi. Les caméras corporelles sont des enregistreurs conçus pour être portés sur l’uniforme d’un agent d’exécution de la loi, permettant d’obtenir un enregistrement audiovisuel des événements selon le point de vue de celui qui le porte, dans l’exercice de ses fonctions.

La police de Calgary équipe déjà ses agents de police de ces mini-caméras tandis que les villes de Toronto, d’Edmonton, d’Halifax et de Montréal envisagent d’adopter cette technologie. Le type de caméra qui serait utilisé enregistre des sons à l’aide de microphones hypersensibles et des images numériques d’une haute résolution, permettant de distinguer clairement les individus.

Ce type de technologie pose différents problèmes au sens notamment de la Charte canadienne des droits et libertés et du Code criminel :

On peut se demander si l’utilisation de ces caméras dans un contexte donné pourrait ne pas répondre aux attentes raisonnables du public en matière de droit à la protection des renseignements personnels ou constituer une interception de communications privées, y compris celles ayant lieu dans des endroits fréquentés par le public.

Le Commissariat formule plusieurs suggestions, nommément de mettre en place des politiques et des procédures afin de traiter des questions telles que la responsabilité, la formation des employés et le traitement des demandes par des particuliers pour l’accès aux enregistrements. De plus, il suggère que les enregistrements devraient être adéquatement protégés par des méthodes comme le chiffrement, l’accès restreint et des périodes de conservation strictes. Il indique qu’il importe également que les critères de mise en marche de la caméra vidéo prennent en compte la nécessité d’enregistrer le moins possible les passants non concernés ou les interactions anodines avec le public.

Brian Beamish,  le Commissaire à la protection de la vie privée de l’Ontario indiquait : «Law enforcement agencies have a responsibility to implement body-worn cameras in a manner that respects privacy and complies with the law»

Jean Chartier le président de la Commission d’accès à l’information du Québec s’est prononcé sur le sujet :

 [ … ] la Commission ne saurait trop insister sur l’importance pour tous les organismes chargés de voir au respect de la loi qui envisagent d’utiliser ces caméras, d’évaluer d’abord les répercussions sur la protection des renseignements personnels des citoyens et les invite à prendre des mesures propres à prévenir ou à atténuer ces impacts. Ces mesures doivent notamment permettre d’assurer la confidentialité des renseignements personnels qui seront ainsi recueillis.

Plusieurs, notamment Anne Bertrand, la Commissaire à la protection de la vie privée du Nouveau Brunswick pensent que le port des caméras «will quickly become the norm in Canada for police agencies.» En effet, il existe certaines preuves démontrant que le port de caméras corporelles réduirait les plaintes relativement à l’usage de la force par les agents de première ligne. De plus, le fait que les caméras conduisent à une plus grande responsabilisation des agents d’exécution de la loi constitue un autre élément important qui milite en leur faveur. C’est pourquoi le Québec devra lire attentivement les recommandations du Commissariat afin d’intégrer cette nouvelle technologie le plus respectueusement possible des droits des citoyens.

Voir autre blogue sur le sujet: Officers wearing body cameras: the beginning of a surveillance state?

This content has been updated on March 8, 2015 at 21 h 32 min.